(Agence Ecofin) - En août 2019, la population malienne manifestait massivement dans plusieurs villes du pays pour protester contre l’état de délabrement avancé des principaux axes routiers. En dépit des efforts consentis par le gouvernement, le réseau routier malien globalement reste sous nanti. C’est l’aveu même de Mme Traoré Seynabou Diop (photo), ministre des Infrastructures et de l’Equipement.
Dans une interview, accordée le 2 octobre au journal l’Essor, la ministre a indiqué que la dégradation des routes du pays s’explique principalement par l’absence des ressources financières pour leur entretien.
Le réseau routier classé du Mali est constitué de trois types de routes : les routes bitumées, les routes en terre et les pistes rurales. L’ensemble de ces routes fait 89 024 km dont 6 605 km sont bitumés, avec seulement 2 667 km (40,38 %) en bon état, et 2 352,7 km (35,62 %) dans un état passable.
« S’il faut mailler le pays, nous avons besoin de 8 000 km de routes dont la construction doit coûter au moins 6 000 milliards FCFA […] les routes coûtent cher et actuellement, les ressources affectées à l’entretien routier ne couvrent qu’environ 35 % des besoins exprimés », explique-t-elle.
Les 7 % du budget national affectés aux infrastructures ne sont « pas peu, mais insuffisants », souligne la ministre. C’est aussi le cas des recettes de péage affectées à l’entretien routier.
« Les ressources générées ne suffisent pas à entretenir un réseau de 89 000 km de route. Pour réparer régulièrement et mettre le réseau routier à niveau, nous avons besoin d’au moins 80 milliards FCFA par an. L’Autorité routière ne procure même pas le ¼ de nos besoins », rappelle-t-elle.
Pour pallier cette absence de fonds propres, le ministère bénéficie d’une part de la redevance sur les produits pétroliers accordée par le ministère des Finances.
« Cela nous aide, mais elle aussi ne suffit pas […] Raison pour laquelle nous nous tournons vers les bailleurs et le partenariat public-privé (PPP) », affirme-t-elle.
Le gouvernement malien travaille avec étroite collaboration avec plusieurs bailleurs de fonds comme la Banque ouest-africaine de développement (BOAD), Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA), Banque africaine de développement (BAD), l’Union européenne, la Banque Islamique de Développement, entre autres.
Seulement sur le terrain, certains chantiers connaissent un ralentissement du fait de l’hivernage ou de l’insécurité. Une collaboration plus étroite est en train d’être ficelée avec les Forces armées maliennes pour la reprise des travaux, notamment dans le nord du pays, rassure la ministre Traoré Seynabou Diop.
Sans se dédouaner de ses missions régaliennes, elle estime aussi que la dégradation du réseau routier au Mali est en partie due à la surcharge « qui est l’ennemie N°1 des routes ».
« Imaginez un camion dont le poids doit être 50 tonnes et qui vient avec 72 tonnes. Avant la fin de la garantie, la route est dégradée parce qu’elle est agressée », constate-t-elle.
Elle pense enfin que la lutte contre la surcharge passe par la mise en application effective du règlement 14 relatif à l’harmonisation des normes et procédures de contrôle du gabarit, du poids et de la charge à l’essieu des véhicules lourds, de transport de marchandises, dans les Etats membres de l’UEMOA, du Ghana et de la Guinée. Cette disposition communautaire piétine depuis son adoption le 16 décembre 2005 à Bamako.
« Tant que tout le monde ne commence pas en même temps, ça ne va pas marcher. Au niveau de l’UEMOA, de nouvelles décisions ont été prises et nous espérons une application intégrale fin 2020 ; c’est-à-dire pas de surcharge, pas de tolérance à la surcharge, délestage (si vous êtes surchargé, on vous décharge). Il faut y arriver pour la survie des routes ».
Romuald Ngueyap
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