Nana Akufu-Addo : les gènes de l’héroïsme

(Ecofin Hebdo) - Parfois, la génétique dépasse de loin la présence chez l’enfant de ressemblances physiques avec son géniteur. Il arrive que des années plus tard, dans des conditions similaires à celles de leurs parents, certaines personnes affichent les mêmes défauts ou les mêmes qualités que leurs géniteurs. Fils d’un héros de l’indépendance, ancien chef d’Etat, le président Nana Akufu-Addo vient peut-être de devenir le visage contemporain de la fierté et de la grandeur africaine.

 

En pleine tournée africaine du président de la république française Emmanuel Macron, Nana Akufu-Addo, le chef d’Etat ghanéen a rappelé, en un discours de 8 minutes, à la France, l’Europe et au monde, que l’Afrique pouvait avoir des ambitions bien plus grandes que son image de continent assisté. Et dans un contexte marqué par la migration et l’esclavage en Libye, ce message a le mérite de remettre chaque Etat africain face à ses responsabilités. Nana Akufu-Addo, quant à lui, ne veut plus développer son pays « aux frais du contribuable étranger ».

 

Héritier mais pas « fils de »

Nana Akufu Ado est venu au monde avec une cuiller en or dans la bouche. Né le 29 mars 1944 à Kyebi, il est le fils d’Edward Akufu-Addo, héros de l’indépendance du Gold Coast, actuel Ghana, et président de la république entre 1970 et 1972. La famille Akufu-Addo fait partie du « Big Six », un groupe de six familles ayant joué un rôle fondamental dans la création de l’Etat Ghanéen. Par ailleurs, Joseph Boakye Danquah et William Ofori Atta, deux autres pères fondateurs de la république du Ghana, sont respectivement son grand-oncle et son oncle.

Sa mère, Adeline Akufu-Addo, est la seule femme ayant comparu devant la Commission Watson, un organe colonial chargé d’enquêter sur les perturbations au sein du Gold Coast, actuel Ghana. Comme son père avant lui, Nana Akufu-Addo est avocat. Malgré tout, l’actuel président ghanéen est loin d’être un simple "fils de".  

Très tôt dans sa jeunesse, il fait appel à son patrimoine génétique de résistant. En 1966, lors du renversement de Kwame Nkrumah, le premier président ghanéen, Nana Akufo-Addo milite au sein des mouvements civiques pour la restauration de la démocratie au Ghana.

 

 akufo addo phone

Il y a étudié le droit au Lancing College, puis à l’université du Sussex, avant de rejoindre Oxford, comme son père.

Persona non grata dans son pays durant le régime militaire, il repart en Grande-Bretagne où il avait étudié jusqu’en 1962. Il y a étudié le droit au Lancing College, puis à l’université du Sussex, avant de rejoindre Oxford, comme son père. Devenu un avocat très prometteur, il travaille en France et au Ghana où il rejoint le barreau en 1975 et y crée son propre cabinet en 1979.

Il se passionne pour les droits de l’homme et plaide gratuitement, à plusieurs occasions, pour des personnes démunies. Il remporte pour son dévouement, le prix international Mère Teresa pour la justice sociale décerné à Bombay, en 2016.

Epris de liberté et d’égalité, il se passionne pour les droits de l’homme et plaide gratuitement, à plusieurs occasions, pour des personnes démunies. Il remporte pour son dévouement, le prix international Mère Teresa pour la justice sociale décerné à Bombay, en 2016.

 

Président du Ghana au bout du quatrième essai

Définitivement installé dans son pays, Nana Akufu-Addo adhère au nouveau parti patriotique (NPP). Il y milite contre la stratégie économique de Jerry Rawlings, qui dirige le Ghana entre 1992 et 2000. Elu député en 1996, Nana Akufu-Addo pense que son tour est venu de présider à la destinée de son pays. Il se présente aux primaires du NPP contre John Kufuor, qui le bat et, un fois président, le nomme en 2001, ministre de la Justice, puis des Affaires étrangères. Au ministère de la justice, il se distingue en révoquant de nombreuses lois antilibérales comme celle sur la diffamation limitant l’activité de la presse.

En 2007, capitalisant sur ses succès et une popularité grandissante, Nana Akufu-Addo démissionne de son poste de ministre des Affaires étrangères pour se présenter à l’élection présidentielle. Cette fois-ci, il remporte les primaires, mais perd le scrutin face à John-Atta Mills, le candidat du Congrès national démocratique (NDC). En 2012, il perd encore au deuxième tour face à John Mahama.

Déçu, Nana Akufu-Addo conteste les résultats en justice, mais est débouté par la Cour suprême. Alors que tout le monde se demande s’il se représentera, l’ancien ministre de la justice fait fi de ses précédents échecs. Cette fois, il commence à préparer le scrutin dès 2014. Il commence à énoncer les différents points de son programme de développement inspiré de la stratégie de développement des pays asiatiques. « Les trois facteurs-clés du développement des économies en Asie sont, selon moi, la modernisation de l’agriculture, l’établissement d’une politique industrielle claire et la rationalisation du secteur financier », déclare-t-il en 2015.

 

 Nana Akufu Addo

En 2012, il perd encore au deuxième tour face à John Mahama.

Annonçant un Etat garant des libertés individuelles et respectueux de son peuple, il convainc la population qui l’élit le 7 décembre 2016. Investi en janvier 2017, il peut enfin, rejoindre le palais présidentiel de Flagstaff House. Il est président, comme papa.

 

Le discours de Nana Akufu-Addo, un vrai faux camouflet à la politique africaine de l’Europe ?

Face à Emmanuel Macron, nouveau président français, Nana Akufu Addo a tenu un discours acclamé par tout un continent. Dans un contexte marqué par l’immigration et le débat sur le franc CFA, entre autres polémiques, ce discours est venu remettre tout un continent face à ses responsabilités.

 

 

Comme l’explique Nana Akufu-Addo, l’Afrique n’a pas besoin de la charité européenne pour se développer et le continent doit se développer par ses propres moyens en misant sur ses propres efforts pour créer des opportunités aux Africains et freiner la vague d’immigration vers l’Europe.

Si, de la bouche d’un chef d’Etat africain, ces propos détonnent et redonnent beaucoup des couleurs à une fierté africaine meurtrie, il faudrait que l’opinion publique africaine puisse considérer le discours de Nana Akufu-Addo comme une mise en garde à l’endroit des présidents du continent.

En effet, peu de chef d’Etat arrivent à élaborer les budgets de leurs pays sans donner une certaine importance à l’aide extérieure. Ce qui semble une attaque au président français devrait plutôt être interprété comme une exhortation aux présidents des nations africaines, à faire sans les aides au développement.

Comme l’a si bien expliqué Nana Akufu-Addo, « on ne peut pas continuer à faire des politiques sur notre continent sur la base du soutien que le monde occidental, la France ou l’UE voudrait bien nous donner. Ça ne va pas marcher, ça n’a pas marché hier et ça ne marchera pas demain ».

 

Servan Ahougnon

 

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