Avec d’autres données du PIB, l’Afrique pourrait se révéler plus riche qu’on ne le croit

(Ecofin Hebdo) - Dans un rapport publié le 03 mars 2018, le FMI dresse l’état de la compilation des données du Produit intérieur brut (PIB) dans 189 économies dans le monde par rapport à six critères clés décrivant les pratiques de compilation des comptes nationaux. Concernant les économies du continent, les performances en demi-teintes réalisées sur la question amènent à s’interroger sur la pertinence des données actuelles, ainsi que sur leur capacité à servir de base objective à la prise de décisions en termes de développement.

En début d’année 2014, le continent africain apprenait avec stupéfaction qu’à la suite d’une révision statistique, le Nigeria été passé première économie d’Afrique (devant l’Afrique du Sud) avec un PIB réévalué à 510 milliards $ en 2013, contre 262 milliards $ en 2012. Le PIB de l’Afrique du Sud étant d’environ 384 milliards $ cette même année. L’ampleur de cette réévaluation du PIB du Nigeria suite à une révision statistique n’est pas un cas isolé en Afrique.

Une mise à jour généralisée au niveau continental pourrait donner un autre aperçu – surement à la hausse – du PIB des pays africains.

Mais il est, par ailleurs, symptomatique de l’obsolescence des données statistiques d’un certain nombre de pays africains. De sorte à estimer qu’une mise à jour généralisée au niveau continental pourrait donner un autre aperçu – surement à la hausse – du PIB des pays africains.

PIB UEMOA

 

L’Afrique pourrait être plus riche qu’on ne le croit

L’une des insuffisances constatées au niveau des données statistiques pour le calcul du PIB des économies africaines constitue, selon le FMI, l’année de référence.

Dans son rapport, l’institution de Bretton Woods explique que les années écoulées depuis la mise à jour de l’année de référence constituent un indicateur clé de la qualité des données des comptes nationaux. L’année de référence correspondant à l’année où les transactions d’une économie telles que la production - y compris les coûts des intrants -, la consommation, la formation de capital, le commerce international et les taxes, sont mesurées et reflètent précisément la structure de l'économie.

Ainsi, l’élément le plus important des révisions des comptes nationaux est probablement la mise à jour de l’année de référence, bien que d’autres révisions majeures existent, par exemple des changements dans les méthodes statistiques et des changements dans les concepts, définitions et classifications.

La mise à jour de l’année de référence améliore généralement la qualité des estimations des comptes nationaux.

Selon le FMI, une bonne pratique consiste à comparer les estimations du PIB tous les 10 ans ou moins. La mise à jour de l’année de référence améliore généralement la qualité des estimations des comptes nationaux en raison de l’incorporation de sources de données nouvellement disponibles et révisées, d’une couverture améliorée, ainsi que de méthodes d'estimation améliorées.

Environ 50% des 189 économies prises en compte dans ce rapport ont mis à jour leur année de référence au cours des 10 dernières années.

En Afrique subsaharienne, sur 45 économies étudiées, seulement 17% (18 pays) ont une référence comprise entre 1 et 10 ans. Tandis que pour 22 pays (49%), l’année de référence est comprise entre 11 et 15 ans. Lorsque 6 pays (13%) ont une année de référence de plus de 15 ans.

La mise à jour de l'année de référence peut avoir un impact important sur le niveau et le taux de croissance du PIB, en particulier si les prix et les volumes ont changé de manière significative. La mise à jour peut également montrer une augmentation ou une diminution, en fonction de l'évolution de l'économie depuis l'exercice d'étalonnage précédent, de la robustesse de la méthode de compilation et de la qualité des données sources.

Ainsi, en Afrique, après le benchmarking, le niveau du PIB à prix courants était de 89% plus élevé au Nigeria, de 60% au Ghana, de 25% en Zambie, et de 10% au Botswana.

 PIB CEMAC

 

La difficulté d’établir des statistiques périodiques

Le PIB étant calculé sur la base des informations et des sources de données disponibles à une période donnée. Les révisions de référence nécessiteraient par exemple des enquêtes exhaustives sur le budget des ménages, des recensements récents de la population, des enquêtes structurelles sur les entreprises... La compilation de ces statistiques (y compris la collecte et le traitement des données) est coûteuse et peut prendre plusieurs mois. Un coût financier et des moyens qui font reculer bon nombre de pays africains.

Les révisions de référence nécessiteraient par exemple des enquêtes exhaustives sur le budget des ménages, des recensements récents de la population, des enquêtes structurelles sur les entreprises...

En effet, constate le FMI, de nombreuses économies ont lancé des efforts pour établir des comptes nationaux trimestriels au cours des 15 dernières années.

La difficulté est d’autant plus affirmée dans la mesure où, alors que les comptes nationaux annuels et trimestriels utilisent les mêmes principes et définitions, les sources de données et les techniques statistiques diffèrent. Les comptes nationaux trimestriels requièrent des données de base plus fréquentes. Même si elles peuvent être moins exhaustives, elles sont généralement complétées par une extrapolation et d’autres techniques statistiques.

Actuellement, 133 économies (70% du total) diffusent le PIB de façon trimestrielle. En Afrique subsaharienne, seulement 53% des économies (24 pays) effectuent un calcul trimestriel du PIB. Ce taux est d’environ 50% au Moyen-Orient, en Afrique du Nord.
Face à cette situation, les initiatives de normalisation des données du FMI obligent les économies à diffuser des données annuelles dans les neuf mois suivant la période de référence et le PIB trimestriel dans un trimestre.

Toutefois, en utilisant ces critères, l’institution de Bretton Woods constate que des données annuelles opportunes sont diffusées par 73% des économies, alors que les données trimestrielles en temps opportun sont diffusées par 55% (77% des économies compilant des données trimestrielles). Dans 32 économies (17% du total), les données annuelles sont diffusées avec un décalage de plus de 15 mois et 25 économies (13%) diffusent des estimations trimestrielles avec un décalage de plus de six mois.

 

Des données pour une meilleure prise de décisions

La ponctualité des données annuelles et trimestrielles sur le PIB est une exigence clé pour la prise de bonnes décisions politiques. Les données annuelles sur le PIB sont nécessaires pour avoir une vision plus détaillée et plus longue des tendances et des cycles de l'économie, tandis que les données trimestrielles sur le PIB sont essentielles pour la surveillance à court terme, les prévisions et l’analyse des politiques.

Le fait de ne pas disposer de statistiques et d’indicateurs crédibles sur les sociétés qu’ils dirigent ne contribuent pas à de prise de décisions adéquates de la part des dirigeants africains.

Et c’est bien là que se situe le talon d’Achille de nombreux pays africains. En effet, le fait de ne pas disposer de statistiques et d’indicateurs crédibles sur les sociétés qu’ils dirigent ne contribuent pas à de prise de décisions adéquates de la part des dirigeants africains.

Impossible donc pour eux d’évaluer précisément leur action quand il n’existe pas d’indicateur fiable du chômage, pas de véritables sondages d’opinion, ou des données trop imprécises sur l’accès de la population aux services publics, par exemple. Une situation qui se trouve être une des causes de mauvaise gouvernance en Afrique, selon certains observateurs.

Borgia Kobri

 

 

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