(Agence Ecofin) - Banca Poupanca e Credito (BPC), la plus importante banque à capitaux publics de l'Angola (75% ministère des finances et 15% Fonds de sécurité sociale et 10% Fonds de sécurité sociale des armées), a réalisé une perte de 53,7 milliards de Kwanzas, soit près de 324 millions $, apprend-on de la note d'information sur le tout récent eurobond émis par le pays, et dont l'Agence Ecofin a pu avoir une copie.
Cette contreperformance, selon les autorités angolaises, est liée à la décision prise, de provisionner les créances douteuses pour près de 924 millions $. Mais derrière cette solution purement comptable, se cache peut-être un trou noir de mauvaise gouvernance, dans un pays qui, entre 2013 et 2016, a connu une production moyenne de 1,7 million de barils de pétrole par jour, pour une population qui, à la fin 2017, ne dépassait pas les 28,3 millions d'habitants, soit 9 fois moins que le Nigéria.
Prenant pour prétexte l'importance systémique de la BPC, le gouvernement angolais a effacé son passif à coup de centaines de millions de dollars, dont les populations auraient eu besoin pour la construction d'infrastructures sociales, encore manquantes dans le pays.
La banque reconnait aujourd'hui que son modèle de gestion des risques, avant la suspension des octrois de crédit à sa clientèle en 2015, a été mauvais. Mais le fait est que cette clientèle était majoritairement constituée de sociétés publiques et surtout du trésor public angolais qui reçoit de cette banque l'essentiel de ses fonds pour des besoins de gestion courante.
Pour maintenir la banque à flots, le gouvernement a autorisé en 2017, une injection directe de 679 millions $, dont une partie mobilisée par emprunt obligataire sur le marché local des capitaux, et une autre partie, via la souscription des actionnaires à une augmentation de capital de 542 millions $.
Par ailleurs, il a été créée une entité dénommée Recredit, appartenant à 100% à l'Etat angolais, et en charge de racheter des créances douteuses au sein des banques angolaise. L'exemple rappelle la structure de défaisance du Nigéria (AMCON). Toutefois l'essentiel des opérations de Recredit l'ont été pour la BPC.
Malgré cette situation délicate de la banque publique angolaise, le gouvernement, qui a à sa tête un nouveau président très volontariste, ne prévoit pas de la privatiser. Au contraire, la loi des finances 2018 prévoit d'augmenter le budget de Recredit de 50 milliards de Kwanzas, et le gouvernement a émis un nouvel emprunt obligataire fin mars, et injecté dans le capital de BPC 1,1 milliard $, le tout, avec la bénédiction du Fonds Monétaire International.
Rappelons que pour financer son déficit budgétaire, le gouvernement angolais a mobilisé 3 milliards $ sur le marché international le 9 mai 2018 via l’émission des titres d’obligations internationales, qui sont cotés sur le London Stock Exchange (Bourse de Londres). Une des tranches de cet eurobond qui arrive à maturité en 2028 a reçu un taux d’intérêt de 8,25% et l’autre tranche qui arrive à maturité dans 30 ans (en 2048), a reçu un taux de 9,375%
Idriss Linge
Lomé, Togo - Organisé par la BIDC.