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Tribune

L’Afrique subsaharienne se met en danger avec ses émissions d’eurobonds

Par Joseph E. Stiglitz and Hamid Rashid Par Joseph E. Stiglitz and Hamid Rashid
  • samedi, 29 juin 2013 05:44

Ces dernières années, de plus en plus de gouvernements africains ont émis des eurobonds, se diversifiant des sources de financement traditionnelles de type dette concessionnelle et investissements étrangers directs. L'absence de vision à long terme des marchés financiers et des gouvernements pourrait causer la prochaine crise mondiale de la dette.

Prenant les devants en octobre 2007, en décidant à l’époque d’émettre un eurobond de 750 millions $ à un taux d’intérêt nominal de 8,5%, le Ghana s’est démarqué comme le premier État subsaharien – si l’on écarte l’Afrique du Sud – à émettre des obligations sur une période de 30 ans.

Cette première initiative subsaharienne d’émission de telles obligations, plus de quatre fois sursouscrites, a déclenché une frénésie d’emprunts souverains dans la région. Neuf autres États – Gabon, République démocratique du Congo, Côte d’Ivoire, Sénégal, Angola, Nigeria, Namibie, Zambie, and Tanzanie – ont emboîté le pas au Ghana. Dès février 2013, ces dix économies africaines avaient collectivement levé 8,1 milliards $ à partir de leurs toutes jeunes émissions d’obligations souveraines, leur échéance moyenne s’élevant à 11,2 ans, et leur taux d’intérêt nominal à 6,2%. La dette extérieure de ces États présentait en revanche un taux d’intérêt moyen d’1,6%, accompagné d’une échéance moyenne de 28,7 ans.

Nul n’ignore que les obligations souveraines emportent un coût d’emprunt significativement plus élevé que celui de la dette concessionnelle. Pourquoi alors de plus en plus de pays en voie de développement recourent-ils aux émissions d’obligations souveraines ? Et pourquoi les prêteurs se sont-ils soudainement pris d’attirance pour ces États ?

Les politiques d’assouplissement quantitatif ayant abaissé les taux d’intérêt à des niveaux plus bas que jamais, l’une des explications consisterait à considérer qu’il ne s’agit là que d’une nouvelle manifestation, encore plus obscure, de l’appétit des investisseurs pour le rendement. Par ailleurs, un certain nombre d’analyses récentes, menées parallèlement à la nouvelle banque des BRICS, ont révélé le caractère dramatiquement inadéquat de l’aide publique et des prêts concessionnels dans la réponse aux besoins en infrastructure de l’Afrique, et encore moins pour atteindre les niveaux de croissance soutenue, nécessaires à la réduction significative de la pauvreté.

Les conditions et l’étroite surveillance habituellement associées aux institutions multilatérales en font par ailleurs des sources de financement moins attractives. Quel responsable politique ne préférerait pas bénéficier de sommes d’argent lui octroyant davantage de liberté pour faire ce qu’il lui plaît ? Il faudra des années pour qu’un certain nombre de problèmes se manifestent – des difficultés qu’il appartiendra alors aux dirigeants futurs de résoudre.

Dans la mesure où ces nouveaux prêts reposent sur le renforcement des fondamentaux économiques de l’Afrique, la récente série d’émissions d’obligations souveraines constitue un signe de bienvenue. Mais, ici comme ailleurs, l’expérience des évaluations du crédit du secteur privé devrait susciter la prudence. Ainsi, l’existence de marchés financiers dénués de vision à long terme, travaillant auprès de gouvernements tout aussi myopes, est-elle en train de semer les graines de la prochaine crise mondiale de la dette ?

Les risques augmenteront indubitablement si les autorités infranationales et les entités du secteur privé bénéficient d’un accès similaire au marché des capitaux internationaux, ce qui pourrait résulter en un emprunt excessif. Les banques commerciales nigérianes ont d’ores et déjà émis des obligations internationales ; en Zambie, le service public de l’électricité, l’opérateur ferroviaire et le constructeur routier ont prévu d’émettre quelque 4,5 milliards $ d’obligations internationales.

Les signes d’une exubérance irrationnelle ou encore d’une attente d’un sauvetage de la part des marchés se font d’ores et déjà sentir. Comment expliquer autrement cette possibilité pour la Zambie de bénéficier d’un taux inférieur au rendement de l’émission d’obligations espagnoles alors même que la notation de ce crédit espagnol est quatre fois plus favorable ? L’ensemble de ces émetteurs subsahariens d’obligations souveraines, à l’exception de la Namibie, présentent en effet une notation de crédit s’inscrivant dans la fourchette « spéculatif, » ce qui place leurs émissions dans la catégorie « obligations à haut risque, » indice d’un risque significatif de défaut.

Les manifestations de ce risque de défaut sont d’ores et déjà visibles. En mars 2009 – moins de deux ans après leur émission – les obligations congolaises se négociaient pour 20 centimes sur le dollar – augmentant le rendement jusqu’à un niveau record. En janvier 2011, la Côte d’Ivoire est devenu le premier pays, depuis la Jamaïque en janvier 2010, à faire défaut sur sa dette souveraine.

En juin 2012, le Gabon a reporté le paiement de coupon sur son obligation d’1 milliard $, dans l’attente du dénouement d’un litige juridique, et n’est pas passé loin du défaut. Si les prix du pétrole et du cuivre venaient à s’effondrer, l’Angola, le Gabon, le Congo et la Zambie pourraient se heurter à des difficultés dans le remboursement de leurs obligations souveraines.

Afin de s’assurer que leurs émissions d’obligations souveraines ne se changent pas en désastre financier, il est nécessaire que ces États mettent en place une structure saine et globale de gestion de la dette, tournée vers l’avenir. Il leur appartient non seulement d’investir leurs recettes dans le bon type de projets à haut rendement, mais également de faire en sorte qu’ils n’aient pas à emprunter davantage pour rembourser leur dette.

Ces États pourraient sans doute tirer un certain nombre d’enseignements de la triste expérience de Détroit, qui émit en 2005 des obligations municipales pour un montant d’1,4 milliard $ afin de parer à l’imminence de la crise financière. Depuis, la ville n’a cessé d’emprunter, principalement dans le but de rembourser ses obligations en circulation. Au passage, les quatre banques de Wall Street qui avaient permis à Détroit d’émettre quelque 3,7 milliards $ en obligations depuis 2005 ont récolté pour 474 millions $ de frais de souscription, primes d’assurance, et autres swaps.

Afin de pleinement comprendre les risques que présentent l’emprunt excessif dans le secteur privé, l’inadéquation des évaluations du crédit des prêteurs privés, ainsi que les conflits d’intérêt qui imprègnent les banques de manière endémique, les États subsahariens devraient imposer des conditions à un tel emprunt, notamment en présence de taux de change significatifs et d’asymétrie importante des échéances.

Quant aux États désireux de se joindre aux rangs des émetteurs d’obligations souveraines, ils feraient bien de tirer les leçons des multiples crises de la dette qui ont marqué ces trente dernières années. La situation pourrait par ailleurs encore s’aggraver à l’avenir, les fameux fonds « vautours » étant devenus maîtres dans l’art de tirer profit des États en difficulté. Les récentes décisions de justice aux États-Unis ont permis aux fonds vautours de prendre le dessus, et pourraient bien compliquer encore la restructuration de la dette, l’enthousiasme suscité par les plans de sauvetage s’érodant par ailleurs clairement. La communauté internationale pourrait à juste titre considérer qu’emprunteurs et prêteurs étaient avertis.

Il n’existe aucun chemin aisé, aucun chemin sans risque, vers le développement et la prospérité. Il n’en demeure pas moins que l’emprunt de sommes sur les marchés financiers internationaux constitue une stratégie qui présente des risques considérables à la baisse – pour un potentiel à la hausse seulement limité – excepté pour les banques, qui perçoivent leurs frais à l’avance.

On ne peut qu’espérer que les économies de l’Afrique subsaharienne ne répéteront pas les erreurs coûteuses qui ont été commises par d’autres pays en voie de développement au cours des trente dernières années.

Les points de vue ici exprimés ne sauraient refléter les opinions des Nations Unies ou de leurs États membres. Traduit de l’anglais par Martin Morel.

Contribution parue dans la rubrique Le Cercle du journal LES ECHOS

Par Joseph E. Stiglitz and Hamid Rashid

 
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